Rien ne vaut un clair de lune à Valenciennes pour Edel Pradot

18/03/2022

Il n'y a pas un jour où Edel Pradot ne pense à la nuit. Pour le danseur, le crépuscule serait l'aube de nouvelles découvertes, un autre éclairage sur l'obscurité. De par ses déambulations nocturnes, Edel s'imprègne de la chaleur et des dangers qui se profilent jusqu'au lever du soleil, pour en faire la somme lors d'une performance unique à chaque ville qu'il parcourt. Ainsi la prestation de Nuit qui se déroulera à l'espace Pasolini ce mardi 29 mars sera dans l'esprit du laboratoire de la structure valenciennoise, telle une veilleuse dans le clair-obscur.

Photo: Véronique Baudoux
Photo: Véronique Baudoux

Aussi loin qu'il s'en souvienne, Edel a rencontré la danse avec une présentation de Hip-Hop, sans le savoir c'est la pratique artistique d'inspiration urbaine qui allait l'animer. Dans sa démarche, la salle où il se produit ne serait que le bout du chemin, un témoignage d'expériences qu'il a vécu à l'extérieur, un contexte qui prend forme par ses pas et ses mouvements. Un parcours de vie qui fait écho à la relation qu'il a avec l'espace Pasolini, il y est rentré pour la première fois lors de sa participation de Fugue par Benoit Duvette, « une rencontre avec un lieu et des personnages », résume-t-il. C'était les prémices de ses premiers projets en danse, « un souvenir agréable, un épanouissement dans ce contexte de laboratoire ».

Comme de nombreux artistes, on ne revient pas simplement à Paso, on y est heureux qui comme Ulysse a fait un long voyage, pour retrouver une chaleur proche de celle du foyer. C'est dans cet esprit que Edel a préparé sa variation de Nuit à la manière valenciennoise. Car depuis 2018 où il porte ce projet de témoignage nocturne, chaque ville donne le ton à sa performance. Ici en l'occurrence il a pu animer des workshops avec des étudiants, qui dans un échange mutuel l'ont guidé à travers le VA by night. « Une expérience enrichissante pour chacun, car même si ils pensaient connaître leur environnement, j'y apportais un regard neuf ».  

Photo: Sofian Hamadaïne-Guest
Photo: Sofian Hamadaïne-Guest

Edel a toujours habité la nuit, c'était pour lui les heures d'écritures, ces moments habités d'une « autre texture ». De par sa pratique de la danse, il pose la question « où vont ses corps ? ». Ces heures sombres sont pour lui portées par le paradoxe, il y a cet effet cocon mais aussi un sentiment de danger, « des perceptions altérées comme ces bruits anodins qui résonnent, la présence du contraste est une comme une mise en tension ». Il parle d'un temps qui ne se dilate pas comme en journée, cette dernière a ses rythmes imposés et ses rituels, « la nuit je prends ce qui vient à moi ». Des récits qui se révèlent à la tombée du jour, on pourrait penser à Shéhérazade, Edel brise la comparaison : « elle racontait pour rester en vie, moi je suis plus à l'écoute, attentif aux choses autour de moi, je n'ai pas la même urgence qu'elle ». Quitte à chercher des inspirations c'est plus vers José-Luis Borges qu'il faut chercher : « il voit la nuit comme un rapport à l'infini, qui dure et ne s'arrête jamais ». Un ouvrage est également venu enrichir sa démarche, celui de Michaël Foessel qui traite d'une thématique proche à Edel : « j'ai rencontré ce texte alors que j'avais commencé ma démarche, j'y ai trouvé des réponses et d'autres questions sont apparues ». A lecture d'une interview que Foessel a accordé à Télérama en 2017 on peut lire : « On y voit moins bien la nuit, certes, mais on y perçoit surtout autrement : tout le corps est engagé », et le parallèle avec la démarche de Edel devient une évidence.

Edel Pradot parle de Nuit comme une pièce chorégraphique, « il n'y a pas d'actes, mais plusieurs parties aux textures différentes ». Une présentation du collectif Mues à voir à l'espace Pasolini ce mardi 29 mars à 19h, entrée gratuite sur réservation.

Le collectif MUES sur Facebook

Nuit sur le site officiel de l'espace Pasolini

X.V.